Réunis durant deux jours à Londres à la fin de la semaine dernière, les ministres des Finances du G7 (Royaume-Uni, France, Italie, Canada, Japon, Allemagne, Etats-Unis) se sont mis d'accord pour défendre l'instauration d'un taux global plancher d'au moins 15% pour l'imposition des sociétés, et soutiennent le principe du paiement de l'impôt dans les pays où les entreprises vendent leurs biens et leurs services.

Autrement dit, les entreprises comme Google ou Amazon devraient elles aussi payer des impôts en Belgique. Cet accord du G7 imposé aux multinationales est qualifié de révolutionnaire. Mais quel sera son impact sur le tissu économique belge, sur les PME, les indépendants, le retail, la consommation ?  Une discussion entre David Clarinval, Ministre des classes moyennes, des indépendants, des PME et de l’agriculture, et Pierre-Alexandre Billiet, CEO de Gondola.

Pierre-Alexandre Billiet : Monsieur Clarinval, si je me base sur les chiffres du EU tax observatory, par rapport au PIB de la Belgique et à son niveau de digitalisation, cet accord représenterait, via déduction sommaire, environ 1,5 milliard d’euros de transfert vers la Belgique. Ce chiffre vous semble-t-il si exceptionnel et révolutionnaire ? 

David Clarinval : Il faut voir l’accord dans sa totalité, bien sûr : ne pas mesurer seulement l’effet fiscal, mais prendre en compte l’effet indirect de relocalisation, car il sera moins intéressant de délocaliser certaines activités vers des paradis fiscaux. 

Cet accord du G7 aura-t-il un impact sur notre tissu économique belge, essentiellement composé de PME ? 

Il est encore tôt pour le dire. Cet accord doit d’abord être transcrit en droit européen, et probablement ensuite seulement en droit belge, mais c’est au Ministre des finances d'identifier comment le traduire en droit belge. Même si le projet est d’après moi révolutionnaire et positif, il faut attendre sa concrétisation, car certains accords préalables du G7 n’ont jamais abouti. Il faut donc rester vigilant, car le diable est dans les détails. 

On pense tous aux petits magasins indépendants, ou même aux plus grandes entreprises belges de distribution comme Colruyt qui se plaignent de concurrence déloyale en matière de digitalisation. Cet accord changera-t-il la donne ? 

Tout d'abord, on a assisté à une accélération de la digitalisation des PME pendant le Covid, même si la moitié des petites entreprises ne sont pas encore correctement digitalisées en Belgique. Cet accord-ci ne doit surtout pas former une raison d'arrêter cette digitalisation, sous prétexte qu’il y aura un rééquilibrage à venir entre les petits magasins indépendants et les grandes multinationales telles qu’Amazon. Le véritable objectif à atteindre est celui d'une digitalisation poussée et soutenue de la part des entreprises belges, et simultanément celui d'une diminution de la concurrence déloyale de la part de ces géants, entre autres digitaux. Les entreprises belges devront donc continuer à composer avec ces géants qui offrent de réelles solutions, mais dont la capacité monopolistique de nuire sera limitée. La concurrence déloyale des mastodontes internationaux se verra donc un minimum régularisée.