Pour les retailers, le gaspillage alimentaire est une question qui fâche. On en veut pour preuve la récente prise de bec entre Comeos et le CRIOC sur le rôle des supermarchés ou les monceaux de salades préemballées jetés par les clients de Tesco.
Selon Eurostat, les food retailers ne seraient responsables que de 5% de l'ensemble des pertes alimentaires. Et selon Comeos, en Belgique, ces pertes se limiteraient même à 2,5%. De plus, les chaînes prennent des mesures pour limiter le gaspillage et offrir ou recycler leurs surplus. Mais l'information selon laquelle la salade préemballée de Tesco atterrit pour 70% dans la poubelle plutôt que dans les assiettes des consommateurs et les critiques du CRIOC à l'égard du retail font malgré tout réfléchir au rôle des supermarchés dans la problématique des déchets alimentaires.
Les promos, source de gaspillageL'étude menée par le CRIOC (Centre de Recherche et d'Information des Organisations de Consommateurs) sur le rôle des supermarchés dans le gaspillage alimentaire aboutit a deux conclusions étonnantes. D'une part, les supermarchés ne tiendraient pas assez compte du gaspillage que provoqueraient leurs promotions et, d'autre part, leur souci d'offrir le meilleur service serait une importante cause de gaspillage. Pour son étude, l'organisme a rencontré les porte-paroles de sept chaînes : Carrefour, Colruyt, Delhaize, Cora, Lidl, Prima et Origin'O. Dans un premier temps, il apparaît qu'en optimisant la gestion des stocks, le retail s'investit pleinement dans la limitation du gaspillage au niveau même des magasins. Mais, car il y a évidemment un mais, dès lors que les produits font l'objet d'une promotion (prix réduits), il est beaucoup plus difficile de prédire la demande, d'où le risque de gaspillage. Les conditions climatiques peuvent elles aussi influer sur les ventes et, selon le CRIOC, cette donnée n'est pas assez prise en compte par les systèmes de gestion des stocks. Le CRIOC estime également que les promotions aux volumes conduisent quasi automatiquement au gaspillage. « Les promotions de type 2 pour le prix de 1 devraient être limitées aux produits non food ou aux produits à longue durée de conservation » conseille l'organisme.
Autre cause du gaspillage alimentaire dans les supermarchés : « le souci qu'ont les retailers de vouloir offrir le meilleur service possible à leurs clients. » Pour le CRIOC, s'il l'on veut proposer du pain frais le soir, il faut inévitablement en jeter. Par la voix de Dominique Michel, son administrateur délégué, Comeos s'inscrit en faux contre cette affirmation : « J'ai déjà entendu beaucoup de sottises, mais celle-ci dépasse l'entendement. Nous serions donc responsables parce que nous offrons au client ce qu'il est venu chercher ? Le raisonnement est le même pour ce qui concerne les promotions : il faudrait nous imputer la responsabilité du gaspillage alimentaire parce que nous offrons des réductions de prix sur des produits en vente rapide ? »
Le consommateur est le plus gros gaspilleur Les deux parties s'accordent cependant sur un point : le consommateur gaspille plus que les retailers. « Les surplus du retail se limitent à 2,5% du total alors que le consommateur est responsable de 25% du gaspillage » a-t-on calculé chez Comeos. Cette semaine, le retailer britannique Tesco a publié des chiffres proprement hallucinants sur le gaspillage alimentaire dont seraient coupables ses clients. Une enquête a révélé que la moitié de tous les produits de boulangerie finissait à la poubelle. Même constat alarmant pour les salades (68%), les pommes (40%) et les bananes (20%). Tesco entend lutter contre ce gaspillage éhonté en exposant moins de pain dans ses rayons et en supprimant les promotions aux volumes sur les salades. La chaîne supprimera également les étiquettes mentionnant ‘à utiliser jusqu'au’ parce que les consommateurs les confondent avec la date de péremption.