« Mestdagh n’est pas aux urgences, mais n’est pas en très bonne santé »: ce sont là les propos que tenait, en début du mois de mars, Eric Mestdagh, qui évoquait, avec le nouveau CEO, Guillaume Beuscart, la préparation d’un plan stratégique prévu pour la fin du premier trimestre et conçu sur un horizon de 2 à 3 ans. Celui-ci semble aujourd’hui prêt, puisque les délégués syndicaux se voient conviés à un conseil d’entreprise extraordinaire ce lundi 7 mai.
Initialement, c’était un conseil d’entreprise ordinaire qui devait se tenir le 7 mai prochain, suivi d’une réunion de concertation. Mais celui-ci s’est mué en un conseil d’entreprise extraordinaire, avions-nous appris la semaine dernière de plusieurs sources. Une convocation qui suscite l’inquiétude parmi le personnel et les représentants syndicaux.
De l’aveu même de la direction, le groupe n’est pas au mieux de sa forme, et des mesures doivent y porter remède. Mestdagh dispose aujourd’hui d’un parc commercial de 83 magasins (dont 52 intégrés). Dans une entrevue accordée à L’Echo, Eric Mestdagh expliquait ne pas vouloir se disperser, préférant miser sur l’expérience d’achat, plutôt que sur l’expansion. Mais Mestdagh est aussi de facto le master franchiser Carrefour Market pour le sud du pays, ce qui crée malgré tout des obligations envers son puissant allié. Le contrat liant Mestdagh à Carrefour arrive à échéance en 2020, date à laquelle il faudra en renégocier les termes. Carrefour détenant 25% du capital de l'entreprise, un changement radical semble ceci dit peu probable.
En scellant sa collaboration avec Carrefour lors de la restructuration connue par ce dernier en 2010, Mestdagh n'a pas seulement repris - à très bon compte, se dit-il - 16 magasins Carrefour menacés, logés dans une structure distincte. Il a aussi converti tout son parc, en le faisant passer de l'enseigne Champion (autrefois détenue par le groupe français Promodès, avant la fusion de celui-ci avec... Carrefour) au concept et cahier de charges Carrefour Market. Les magasins revendiquent toutefois ouvertement leur appartenance au groupe familial qui a toujours bénéficié d'une image flatteuse: "Carrefour Market Groupe Mestdagh" figure en bonne place dès l'entrée. Dans le réseau Carrefour Market, Mestdagh maintient pourtant quelques traits spécifiques. Il dispose par exemple d'un outil logistique qui lui est propre. L'excellente réputation dont jouit Mestdagh sur le frais, et en particulier la boucherie au comptoir service traditionnel, a longtemps fait figure d'atout. Mais c'est un terrain sur lesquels certains de ses concurrents directs en Wallonie, tels qu'Intermarché, ont résolument choisi l'offensive. Mestdagh se doit d'être à la fois loyal à Carrefour Market et fidèle à certains de ses éléments de différenciation: un exercice délicat. C'est peut-être de la sorte qu'il faut lire les échos ayant circulé dans le métier, et selon lesquels l'entreprise a récemment lancé une procédure de recrutement de spécialistes du frais dans les équipes d'achat qui lui sont propres.
Evoquant en mars le plan stratégique en cours de préparation, Guillaume Beuscart soulignait le besoin de se reconcentrer sur l’évolution du comportement d’achat des consommateurs, notamment vie une révision de l’assortiment et l’étude des opportunités qu’offre la technologie. Et Eric Mestdagh d’ajouter que, en tant qu’entreprise non-cotée, il serait facile de ramener les comptes dans le vert en arrêtant par exemple la formation et les investissements. « Mais cela a-t-il du sens dans une entreprise familiale qui a 118 ans et qui regarde sur le très long terme? Ce n’est pas dans notre philosophie. Nous ne voulons pas dénaturer notre savoir-faire en réagissant à la petite semaine. Avec Guillaume, nous voulons bâtir sur des bases solides. » On sera dès lundi fixés sur le contenu de ce projet, et sur son impact social.