C'est officiel: après 4 mois de concertation sociale, la direction de Carrefour Belgique a signé un protocole d’accord avec les partenaires sociaux concernant son plan de transformation. Le nombre de suppressions d’emploi passe de 1.233 emplois à 950 emplois. Quatre options de départ sur base volontaire seront proposées aux collaborateurs afin d’éviter tout licenciement sec.
Le 25 janvier 2018, Carrefour Belgique annonçait son Plan de Transformation majeur qui avait deux objectifs: répondre aux nouveaux défis du commerce via l’omnicanalité, la refonte de l’offre, l’efficacité du travail et le renforcement des compétences, etrédqire les dépenses ainsi que les frais de fonctionnement tout en augmentant l’efficacité au sein des hypermarchés et du siège. Selon le plan de transformation annoncé, 1.233 emplois se voyaient menacés: 1.053 au sein des hypermarchés et 180 au siège.
La direction s’était toutefois engagée à faire tout ce qui était possible pour limiter les conséquences sur l’emploi et les collaborateurs. Suite à 11 Conseils d’Entreprise extraordinaires et 6 semaines de négociations, un accord a été trouvé avec les partenaires sociaux sur les différents volets de ce plan. Il s’est concrétisé par la signature d’un protocole d’accord entre les parties ce jour. Nous vous en détaillons le contenu.
Accord sur les magasins
Contrairement à ce qui avait été initialement planifié, les hypermarchés de Belle-Ile (Angleur) et Genk resteront ouverts, mais sous le format Carrefour Market (supermarchés intégrés). Le magasin de Belle-Ile aura une superficie de 2550 m². Celui de Genk aura une superficie de 2500 m² et la direction s’engage à y chercher une localisation alternative d’ici novembre 2019 et à explorer toutes les alternatives possibles afin de poursuivre une activité commerciale et rentable dans la ville. Les conditions salariales actuelles des collaborateurs qui passeront sous enseigne Carrefour Market intégré seront maintenues. Les nouveaux entrants seront par contre engagés aux conditions Market intégré. La transformation en supermarchés intégrés est prévue pour novembre 2018.
Les hypermarchés de Westerlo, Brugge St-Kruis et Haine-St-Pierre seront également transformés en Carrefour Market (supermarchés intégrés). Ils auront une surface respective de 2502 m², 2505 m² et 3.048 m². Il s’agit donc d’une réduction de surface moins importante que prévue. Les conditions salariales actuelles des collaborateurs qui passeront sous enseigne Carrefour Market intégré seront maintenues. Les nouveaux entrants seront par contre engagés aux conditions Market intégré. La transformation en supermarchés intégrés est également prévue pour novembre 2018.
L’hypermarché de Turnhout ne sera finalement pas réduit de surface et des partenaires externes pourront être intégrés au magasin afin d’augmenter l’attractivité du site.
« Pour tous les hypermarchés, l’organisation du travail au service du client sera améliorée. Cette organisation permettra à chaque collaborateur d’être polyactif dans sa zone d’appartenance (Univers) et donc de garantir une répartition équilibrée de la charge de travail entre membres d’une même équipe pour un service optimal au client » souligne le retailer. Parallèlement, des équipes commerciales prêtes à intervenir seront mises en place sur base volontaire pour intervenir là où le besoin se fait sentir en fonction des besoins des clients et de l’affluence. De même l’installation de self-checkout dans tous les magasins doit permettre d’améliorer le flux et le service aux clients. La nouvelle organisation et les nouvelles caisses seront implémentées en magasin entre septembre 2018 et juin 2019.
Formations
Le nombre de formations pour tous les collaborateurs sera revu à la hausse afin d’accompagner chacun dans l’apprentissage de nouvelles compétences, notamment en matière digitale et formation métier.
Chaque collaborateur recevra un passeport digital qui lui permettra de disposer d’une vue claire de ses capacités actuelles. Sur cette base, un plan de formation sur mesure sera développé pour chacun. Carrefour entend permettre à ses collaborateurs de se développer afin qu’ils puissent disposer de toutes les compétences pour répondre au métier de commerçant du futur.
Le siège
« Au niveau du siège, Carrefour va évoluer vers une organisation plus efficace » explique l’enseigne. Ceci implique le recours à des procédures simplifiées et moins contraignantes, à une meilleure accessibilité de l’information, à la priorisation des projets. « Le regroupement des fonctions opérationnelles liées aux 3 formats (Hypermarchés Carrefour, Carrefour Market, Carrefour Express) participe également à cette logique de meilleure intégration qui va permettre au siège d’être pleinement au service des magasins ».
Les formations seront également plus nombreuses, notamment en ce qui concerne le digital. La mobilité interne et les périodes d’apprentissage et d’échange entre les magasins et le siège seront nettement encouragées et développées.
Les départs : de 1.233 à 950
Les différentes décisions mentionnées ci-dessus ont permis de réduire le nombre de suppressions d’emploi de 1.233 à 950.
Pour réduire autant que possible le nombre de licenciements secs, Carrefour entend mettre en place plusieurs mesures. Cela comprend notamment le chômage avec complément d’entreprise (RCC, ex-prépension) : tous les collaborateurs (hypermarchés et siège) ayant au moins 56 ans au 25 janvier 2018 pourront introduire une demande de départ en RCC à condition d’avoir travaillé pendant 20 années peu importe le secteur ou d’avoir travaillé 10 années dans le secteur du commerce au cours des 15 dernières années.
Autre mesure, celle du départ volontaire. Cette option permet aux personnes qui ne peuvent accéder au RCC de prendre la décision de quitter l’entreprise tout en recevant une « indemnité financière intéressante ». La formule du départ volontaire sera ouverte à la majorité des catégories de collaborateurs tant au sein des hypermarchés que du siège.
Aller travailler dans un autre magasin, prendre un autre poste dans son magasin, quitter son magasin pour aller travailler au siège ou occuper une autre fonction au siège feront également partie des options proposées.
Enfin le crédit-temps fin de carrière permettra aux collaborateur de 55 ans et plus de terminer sa carrière en mi-temps tant au sein des magasins qu’au siège (hors management).
Accompagnement des collaborateurs
« Les collaborateurs qui quitteront l’entreprise seront bien entendu suivis par la cellule pour l’emploi (aussi appelée cellule d’outplacement) qui les accompagnera tant sur le plan individuel que collectif (bilan de compétences complet, formation au changement, aide à la rédaction d’un CV, analyse du marché et des offres en lien avec les compétences du collaborateur, formation au réseautage, information sur le statut d’indépendant) » souligne Carrefour.
Le retailer indique en outre vouloir aller plus loin que le cadre-légal de la cellule pour l’emploi, et proposera plusieurs options: suivre des formations dans le domaine digital pour apprendre de nouvelles compétences ; accéder aux formations e-Learning et aux workshops organisés dans le cadre de nouveaux outils de travail tel que G Suite de Google ; suivre les formations en customer centricity et accompagnement client ; suivre des formations ‘personnalité’ afin de mieux connaitre leur profil ; avoir des entretiens personnalisés avec le département recrutement et sélection afin d’établir un bilan de compétence complémentaire.
Les départs s’organiseront par phase
Au niveau du timing, les départs se feront par phase. Ils s’étaleront entre la fin du mois de novembre 2018 et la fin du mois de juin 2019. « Ces 4 derniers mois ont été intenses et éprouvants pour tous les collaborateurs. Cette période a été longue mais la direction ne voulait négliger aucun élément. Chacun va maintenant pouvoir être informé des différentes solutions trouvées. L’accompagnement de chaque collaborateur restera la priorité pour les mois à venir » précise la société.
Le SETCa avait encore émis 3 points de blocage
Le SETCa a été le dernier à se dire prêt à signer l’accord. Pour rappel, l’Intersiège du SETCa avait émis trois points de blocage concernant le protocole d’accord Carrefour. Le SETCa exigeait d’avoir un accès plus large, pour les malades de longue durée des cinq magasins hypermarchés transformés en Market, aux formules de départs volontaires de l’entreprise. « Si le SETCa n’obtient pas gain de cause totalement sur ce point, il obtient néanmoins la garantie que la direction, en cas de retour au travail de ces malades de longue durée, leur assurera un poste adapté dans l’hypermarché le plus proche de leur domicile. Ce qui éloigne le spectre d’un licenciement pour force majeur pour ces personnes » note le syndicat. « Sur la garantie d’emploi au niveau des services centraux, la direction confirme qu’elle n’opérera pas, au-delà de la présente restructuration, de licenciement économique de CDI jusque fin 2022. Si d’hypothétiques externalisations devaient être envisagées, elles feraient l’objet d’une négociation préalable à toute mesure impactant l’emploi. Sur l’élargissement du crédit-temps, la direction donne raison au SETCa et permettra les crédits- temps, tant au siège que dans les magasins, jusque et en ce compris la catégorie 5. C’est une avancée, sachant que pas mal de managers risquent de voir leurs postes de travail disparaître dans le cadre de la nouvelle organisation des magasins. Cette piste de crédit-temps élargi permettra, à n’en pas douter, d’éviter ainsi des licenciements ».
Quid des représentants politiques?
Reste encore à savoir si ce protocole d'accord recevra l'aval des représentants politiques. Hier encore, le ministre flamand de l’Emploi, Philippe Muyters, est clair, pour lui, ce sera « non ». C’est ce qu’il a affirmé devant les caméras de la VRT, malgré l’appel du SETCa de calmer le jeu et de ne pas prendre les travailleurs concernés en otage…