« C’est satisfaisant d’appuyer une fois sur le bouton pause », a déclaré Wouter Torfs lors du quatrième webinaire de Gondola Society, en réponse à la crise du coronavirus. Mais il semble observer en même temps ce qui va arriver. La fermeture des magasins et le licenciement du personnel n'est pas exclu.

S’il n'est pas inquiet, Wouter Torfs s'est tout de même réveillé le matin-même avec un mauvais pressentiment au sujet de la crise du coronavirus. « Je me suis dit que c'était un cauchemar. Comment allons-nous sortir de ça ? Désormais, je n'ai plus ce sentiment. Nous attendons avec impatience la réouverture des magasins. Nous faisons tout notre possible pour assurer un redémarrage en toute sécurité pour nos clients et notre personnel : nous commandons des masques de protection, des gants et des protections en plexiglas contre la propagation. Nous tenons également notre personnel informé de ce qui se passe, de la situation financière et de nos perspectives. Nous voulons communiquer aussi ouvertement que possible, c'est la seule façon de faire participer le personnel. Il est clair que nous ne pourrons pas rouvrir immédiatement à plein régime. Cette réouverture devra être réalisée avec un minimum de personnel afin de minimiser le risque de contamination. Nous devrons également revoir le service que nous offrons habituellement. Dans le contexte actuel, nous devons nous adapter.

Comment vivez-vous cette crise ?

Je trouve qu’appuyer sur le bouton pause est assez satisfaisant. C'est un soulagement de ne pas devoir aller à une réunion à laquelle je n’ai pas envie d’assister ou de faire certains déplacements. Je me demande désormais si je dois continuer à faire ces choses-là à l'avenir. Mais en même temps, c'est une période très intense. Je dois prendre des décisions pour l'avenir et suis inquiet de l'état de notre économie. Pour le moment, tout est encore calme et les problèmes passent sous le radar, mais une fois que nous aurons redémarré, nous verrons à quel la situation est grave. Nous avons des indemnités de circonstance et du chômage technique, mais cela ne veut pas dire que nous n'aurons pas de gros problèmes.

Avez-vous pensé au fait que Shoes Torfs pourrait ne pas survivre ?

Oui, j’y ai pensé, évidemment. Des magasins vont forcément disparaître et je ne vois aucun acteur ouvrir de nouveaux magasins. Les choses vont changer. Je prends également en compte le fait que nous devrons sans doute licencier du personnel et fermer certains magasins. C'est une chose à laquelle nous pensons en ce moment. Il faut qu'on s’en sorte, même si je dois dire que nos magasins ont une base solide.

Vous estimez que les propriétaires de magasins ne devraient pas s'attendre à ce que vous payiez la totalité des frais de location. Un dialogue est-il possible à ce sujet ?

J'espère qu'il y aura un cadre législatif clair dans lequel le gouvernement décidera de partager les risques et les dommages aussi équitablement que possible. J'ai déjà reçu des réponses positives à cet égard. Je pense que c'est logique : nous n'avons pas pu disposer de nos magasins normalement. La législation indique clairement qu'il s'agit là d'un argument crucial.

En ces temps de crise, pour plaider à nouveau en faveur de l'achat local.

Je pense qu'il est clair que la mondialisation débridée n'est ni durable ni tournée vers l'avenir. Les gens me demandent parfois : « D'accord Wouter, mais fais-tu aussi des chaussures belges ? Non je n’en fais pas, mais je vends ici, en Belgique. Je pense qu’il y a aujourd’hui une dynamique qui puisse convaincre les gens d'acheter plus localement. Je suggère une initiative où tous les magasins belges se rassemblent en ligne. Tout à l'heure, l’un des participants du webinaire a suggéré de l'appeler ‘Bel.com’ : j'ai trouvé que c'était une excellente idée.

Votre magasin a connu une croissance explosive pendant cette crise. S’agit-il également d’un point de basculement ?

Je pense qu'il y aura une évolution durable vers le commerce électronique pour le client, oui. Quelque chose va probablement changer pour nous aussi. Le e-commerce était jusqu’à présent un peu l’appendice des magasins, tandis qu'à l'avenir il deviendra davantage le cœur du dispositif. Pour l'instant, le comportement de nos clients en ligne est complètement différent de ce qu'il est d'habitude. Le nombre de retours a considérablement diminué, passant de 27% à 8%. C'est parce que les gens achètent maintenant des choses dont ils ont vraiment besoin. La croissance la plus importante se situe du côté des produits pour enfants. Cela signifie également que le panier moyen est moins rempli : 83 euros aujourd’hui au lieu de 91 euros auparavant.