L'annonce d'un nouveau plan de restructuration chez Makro n'est pas une vraie surprise, la nature de certains choix l'est davantage. Trois commentaires à chaud sur cette actualité.
Christophe Sancy, rédacteur en chef de Gondola:
“L’annonce d’un nouveau plan de restructuration, deux ans après celui de 2014, n’est pas une surprise: le chiffre d’affaires de Makro avait continué de s’éroder rapidement, en passant juste sous la barre du milliard d’euros en 2015 (998,6 millions), tandis que les pertes nettes de l’exercice atteignaient 33 millions d’euros. A ce rythme-là, dans un groupe lui-même en délicatesse à l’échelle internationale, c’est l’avenir même de Makro en Belgique qui était menacé si aucune mesure n’était prise. Celles qui sont révélées aujourd’hui ont un caractère radical, en particulier pour Makro, dont le concept lui-même est en cause, contrairement à Metro, l’enseigne servant les professionnels des métiers de bouche. Une fois pour toutes, le concept hybride du point de vente géant réservé aux pros et aux indépendants, mais tournant en réalité sur une clientèle privée a vécu. Désigner le consommateur comme la cible véritable a le mérite d’entériner une réalité: elle représente 80% du chiffre d’affaires. Makro devient-il pour autant un hypermarché comme les autres? Pas réellement, puisqu’on n’y trouvera plus vraiment tout sous un seul toit. C’est sur l’alimentaire qualitatif, le festif et l’univers home & garden qu’il faudra prouver - et communiquer - une différence spectaculaire. Et le choix des enseignes partenaires capables de porter les univers auxquels renonce Makro (electro, textile, …) sera déterminant. Ce Makro-là aura besoin de véritables locomotives pour assurer le trafic.”
Pierre-Alexandre Billiet, CEO de Gondola Group:
"Il faut reconnaître que le groupe Metro-Makro perdait beaucoup de chiffre d'affaires en Belgique, de l'orde d'un magasin par an, soit près 100 millions d'euros. La nouvelle stratégie proposée pour la Belgique en 2014 n'a pas porté ses fruits car elle était disparate, trop légère et pas assez cohérente et impactante. Cette nouvelle annonce était attendue, mais elle est remarquable car elle est une remise en question complète de certains acquis de Makro-Metro. Il est parfois plus facile de commencer avec une page blanche que sur base d'un concept existant que de restructurer un groupe comme Metro-Makro. Le groupe ose externaliser certaines activités à des partenaires. Oser développer un écosystème en donnant de l'espace à certains partenaires category captains (des marques leader dans leur marché) est un vrai changement mental pour un distributeur: il faut dès lors gérer des partenaires, et non plus des fournisseurs. Les produits de technologie, mais également les livres et le textile devront être gérés dans un écosystème. Les écosystèmes sont néanmoins l'avenir pour le commerce et le retail en général. Pour Metro- Makro, le point le plus dangereux est le timing: un plan de changement à 2,5 ans dans un monde qui change rapidement est un vrai challenge, car les plans initiaux ne seront peut-être plus d'application dans 2,5 ans. Même si l'évolution des 500 emplois impactés sur 3000 n'est pas une sinécure, il faut tenir compte de la rapidité de changement du marché de la distribution et du retail actuel en Belgique."
Silvie Vanhout, Managing Partner de The Retail Academy:
“En rassemblant les données nécessaires à la parution de notre poster Gondola Retail Scan 2016, il semblait déjà évident que Makro serait confronté à la nécessité de prendre d’urgence des décisions majeures. Par rapport à 2014, Makro et Metro chutent de près de 8,5%. Si l’on prend 2012 comme point de référence, ce recul atteint même 17%. Ce n’est bien entendu pas tenable. Souhaitons-leur de retrouver les faveurs du consommateur avec ce nouveau positionnement.”