+ Plus Alex Ootes (Amazon): “Plus de la moitié des articles sont vendus par des PME”
Vice-président de l’expansion européenne d’Amazon, Alex Ootes, Vice-président de l’expansion européenne d’Amazon , lève un coin de voile sur les défis du commerce en ligne en 2019.
Il est relativement rare qu’un haut responsable d’Amazon accepte de donner une interview à la presse. Vice-président de l’expansion d’Amazon en Europe, Alex Ootes évolue depuis 14 ans au sein de la hiérarchie du géant du commerce en ligne. Il nous reçoit dans les bureaux du quartier général, situés au nord-est de Luxembourg-Ville, dans un tout nouveau quartier d’affaires, où plus de 1500 employés évoluent pour le compte d’Amazon. “Ici au Luxembourg sont implantés les services classiques d’un quartier général, tels que le département finance, comptabilité ou aspects légaux”, souligne Alex Ootes, originaire des Pays-Bas. “Chez Amazon, nous considérons que le quartier général ne doit pas être une tour d’ivoire. C’est la raison pour laquelle vous trouverez ici des équipes opérationnelles de différents départements comme les private labels et les nouveaux segments de marchés.” A noter qu’un petit bureau d’Amazon Belgique est situé à Bruxelles et, pour information, le siège mondial est situé à Seattle.
Vous travaillez depuis bientôt quinze ans pour Amazon. Quels postes avez-vous occupés ?
J’ai d’abord travaillé au bureau de Munich (Allemagne) durant 3 ans. J’ai occupé des fonctions de management dans les catégories musique et jeux vidéos. Cette première expérience m’a permis de comprendre comment m’orienter vers le consommateur, apporter de vraies solutions, choisir les bons produits et fixer les bons prix. Nous avons notamment réintroduit les vinyles, c’était il y a déjà douze ans ! J’ai ensuite eu l’opportunité de travailler au quartier général au Luxembourg en tant que directeur européen d’un département appelé “fulfillment network” (réseau de réalisation). A l’époque, il existait trois marchés : l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne. Ces trois segments de marchés opéraient de manière plus ou moins indépendante et l’une des mes priorités était de nouer des ponts entre ces segments de marchés. J’ai également participé au développement d’Amazon Italie et Espagne. J’ai également développé la partie “private label” (les marques propres des vendeurs), dont fait partie AmazonBasics, et développé les produits orientés food.
Votre titre est Vice-président de l’expansion pan-européenne. En quoi consiste votre rôle ?
Notre équipe tente notamment de lancer de nouveaux segments de marchés en Europe, comme ce fut le cas en septembre dernier avec le lancement d’Amazon Turquie. La Turquie est un pays aussi dynamique et en croissance que d’autres pays d’Europe occidentale. Une équipe dédiée travaille sur le marché turc depuis le Luxembourg. En 2016, nous avons lancé la version hollandaise d’Amazon Germany et nous l’avons adaptée en 2017 pour le téléphone mobile. En 2017, nous avons introduit en Belgique le paiement Bancontact. Nous tentons mois après mois d’apporter des nouveautés aux segments de marchés déjà existants.
Les Belges doivent notamment passer par Amazon.fr pour opérer leurs achats. Pourquoi n’existe-t-il pas encore de site dédié au marché belge et développez-vous un projet en ce sens ?
Nous sommes très ouverts à accueillir des vendeurs belges et nous avons fait des investissements pour le segment de marché du Benelux. Les vendeurs belges doivent se rendre compte qu’ils pourront très vite rencontrer un certain succès sur le marché européen en utilisant les plateformes étrangères comme Amazon.fr. Notre rôle est de faire en sorte que le nombre d’étapes pour commencer à vendre des produits soit le plus réduit possible. Aujourd’hui, une vente peut démarrer en quelques clics.
Comptez-vous toutefois développer d’autres segments de marchés en Europe ?
La politique d’Amazon n’est pas d’annoncer le lancement de nouveaux segments de marchés avant leur mise en service. Nous avons toutefois une série d’objectifs à atteindre ces prochains mois. Nous avons notamment opéré une extension pour la Pologne et nous développons beaucoup de fonctionnalités qui ne se voient pas nécessairement, mais qui améliorent l’expérience consommateur. Les plus gros segments de marchés en Europe sont toujours la Grande-Bretagne et l’Allemagne. Notre stratégie, c’est plutôt d’améliorer au maximum l’expérience consommateur – et vendeur – pour que les gens se dirigent sur Amazon. Aujourd’hui, nous devons moins démarcher, les vendeurs et acheteurs viennent d’eux-mêmes car le service est très bon.
Le secteur du retail est en évolution constante. Que constatez-vous au niveau des vendeurs chez Amazon ? Ont-ils un profil particulier ?
Les personnes qui vendent chez Amazon viennent de structures de plus en plus petites. Plus de la moitié des articles vendus sur Amazon sont vendus par des PME ou des indépendants. Ces petites et moyennes entreprises ont vendu plus de 2 milliards d’articles au cours du premier semestre 2017. En 2017, plus de 140 000 vendeurs dans le monde ont réalisé plus de 100 000 dollars de chiffres d’affaires et 20 000 entrepreneurs ont réalisé des ventes supérieures à 1 million de dollars. Nous estimons par ailleurs que les vendeurs sur Amazon génèrent 900 000 emplois. Aujourd’hui, il est plus facile de démarrer un business et de connaître le succès. Quand j’ai commencé chez Amazon, les vendeurs se rendaient sur le site grâce au bouche à oreille. Il y a sept ou huit ans, je me souviens avoir tenté de vendre des objets d’art sur Amazon. Je me suis rendu compte qu’il y avait beaucoup de vendeurs… mais très peu d’acheteurs ! Ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui : Amazon propose même aujourd’hui un Artstore.
Amazon est critiqué pour avoir fait de l’e-commerce un système globalisé. Peut-on considérer que le petit commerce de quartier soit menacé par Amazon ?
Pas forcément. Je prends l’exemple de quelques passionnés belges très intéressés par la vente de thé japonais. Ils auraient pu créer un magasin, mais ils ont créé leur société et ont démarré leurs ventes via Amazon UK et Amazon Germany. Ils ont ensuite développé les ventes via Amazon France, Italie, Espagne et maintenant aux États-Unis. Leur job est de sélectionner et faire venir du thé du Japon, compléter par du marketing et du branding et Amazon s’occupe du reste : la logistique et même le marketing ! Les exemples du style sont nombreux. Beaucoup de très petites structures ont du succès en vendant leurs produits via Amazon ou même via leur site e-commerce. Il y a quinze ans, il devait y avoir environ 100 vendeurs en Belgique alors qu’il y en a plusieurs milliers aujourd’hui.
Tout compte fait, ce sont les gros vendeurs qui sont les plus en compétition avec Amazon ?
De très gros vendeurs passent aussi par Amazon et ils sont traités de manière égale avec les petits vendeurs. Certaines sociétés font le choix de passer par leur propre système, nous le comprenons tout à fait. Par ailleurs, certains vendeurs pourraient tout à fait vivre sans Internet. J’achète moi-même mes lunettes chez l’opticien car j’y trouve l’expérience, l’expertise ou encore l’interaction. L’avantage d’Internet, c’est de pouvoir démarrer tout de suite sans forcément devoir investir dans la location d’un bureau ou d’assumer des charges.
Quel conseil donneriez-vous à une personne qui aimerait démarrer la vente sur Amazon ?
Le premier conseil est d’être sûr que votre produit soit adapté au marché et que vous le vendiez au bon prix. Il faut par ailleurs investir dans le marketing. Pour la suite, Amazon prend quasiment tout le reste en charge. Un vendeur doit comprendre que le système globalisé d’Amazon peut lui permettre d’aller très vite. En gros, les vendeurs qui vendent le bon produit peuvent facilement se lancer sur d’autres segments de marchés. Les connexions sont d’ailleurs de plus en plus nombreuses entre les pays : la version allemande attire de nombreux acheteurs de Grande-Bretagne et inversement.
Géry Brusselmans
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